Le Bouard Avocats
La gouvernance des sociétés anonymes (SA) a toujours été un sujet technique, souvent perçu comme complexe par les chefs d’entreprise. Pourtant, elle conditionne directement la manière dont une société est dirigée et contrôlée. Depuis août 2025, une réforme importante est venue simplifier la vie de nombreuses entreprises : le seuil de capital permettant de désigner un directeur général unique dans une SA à directoire est désormais fixé à 250 000 €, contre 150 000 € auparavant.
Ce relèvement n’est pas anodin. Il offre de nouvelles marges de manœuvre aux petites et moyennes structures, qui peuvent opter pour une gouvernance allégée, plus rapide et moins coûteuse. Mais il implique aussi des choix stratégiques et des précautions juridiques à ne pas négliger.
Une société anonyme peut être organisée selon deux systèmes :
Le directoire est en principe composé de plusieurs personnes (deux à cinq membres, voire sept si la société est cotée). Il s’agit donc d’une gouvernance collégiale, où les décisions sont prises collectivement.
La loi prévoit cependant une dérogation. Lorsque le capital social est inférieur à un certain seuil, les fonctions du directoire peuvent être exercées par une seule personne : le directeur général unique. Celui-ci concentre l’ensemble des pouvoirs de gestion, tout en restant placé sous le contrôle du conseil de surveillance.
Jusqu’à l’été 2025, ce seuil était fixé à 150 000 €. Désormais, il est porté à 250 000 €.
Fixé il y a plus de trente ans, le seuil de 150 000 € ne correspondait plus au contexte actuel. L’inflation et l’évolution du financement des entreprises rendaient cette limite obsolète. En l’élevant à 250 000 €, le législateur permet à davantage de sociétés de bénéficier de la possibilité de nommer un dirigeant unique.
Désormais :
Cette règle simple clarifie les choix de gouvernance et trace une frontière nette entre les petites et moyennes SA et celles de taille plus importante.
Ce sont principalement les PME et sociétés familiales, souvent créées avec un capital compris entre 150 000 € et 250 000 €, qui vont tirer profit de cette réforme. Elles peuvent désormais réduire la complexité de leur gouvernance et centraliser la direction.
Un directoire collégial exige des réunions, des délibérations et des consensus. Cela ralentit parfois la prise de décision. Avec un directeur général unique, la société gagne en rapidité et en souplesse : un seul responsable prend les décisions exécutives, ce qui facilite l’action au quotidien.
Un directoire composé de plusieurs membres suppose le versement de plusieurs rémunérations et, souvent, des frais annexes liés à leur activité. En optant pour un dirigeant unique, l’entreprise réduit ces coûts. Pour un chef d’entreprise, cela peut représenter une économie significative et une meilleure maîtrise des charges.
Dans un directoire collégial, il peut être difficile d’identifier qui est responsable d’une décision. Avec un dirigeant unique, la responsabilité est claire et assumée par une seule personne. Cela apporte de la transparence vis-à-vis des associés, des investisseurs et des partenaires.
Banques, fournisseurs, clients et investisseurs apprécient de traiter avec un interlocuteur unique. Cela simplifie les relations d’affaires et renforce l’image de la société en termes de réactivité et de cohérence stratégique.
L’avantage de la collégialité est de confronter plusieurs points de vue, de partager les responsabilités et d’éviter les excès de pouvoir. Avec un directeur général unique, toutes les décisions reposent sur une seule personne. Cette concentration peut être un atout en termes d’efficacité, mais aussi un risque en cas d’erreurs de gestion.
Le conseil de surveillance devient un contre-pouvoir indispensable. Il doit exercer un contrôle rigoureux sur les décisions du directeur général unique. Pour un chef d’entreprise, cela implique d’anticiper une relation de collaboration étroite avec cet organe de contrôle.
Le passage d’un directoire collégial à un dirigeant unique peut poser des difficultés si les membres du directoire en place estiment avoir été écartés de manière abusive. Toute révocation ou réduction de mandat doit être justifiée et juridiquement sécurisée. Faute de quoi, l’entreprise pourrait être exposée à des litiges coûteux.
Pour un chef d’entreprise qui souhaite profiter de ce nouveau seuil, voici les étapes essentielles :
Le relèvement du seuil à 250 000 € pour la désignation d’un directeur général unique dans les SA à directoire est une réforme pragmatique qui offre aux chefs d’entreprise une opportunité réelle de simplification. Elle permet de gagner en efficacité, de réduire les coûts et de renforcer la lisibilité de la gouvernance.
Mais cette liberté nouvelle doit s’exercer avec prudence. La concentration du pouvoir dans les mains d’un dirigeant unique exige une surveillance accrue, une transparence renforcée et une rigueur juridique à chaque étape.
Pour les dirigeants de PME et de sociétés familiales, cette évolution constitue un levier stratégique : bien utilisée, elle peut devenir un outil de compétitivité et de croissance. Mal gérée, elle peut en revanche fragiliser la société sur le plan juridique et organisationnel.